Interview avec les développeurs d'Alea Jacta Est

HistoriaGames
La rédaction
Thématique
17 août
2012

Alea Jacta Est - Roman Civil Wars sort dans environ un mois sur PC, et nous avons souhaité en savoir plus sur ce jeu de stratégie très prometteur développé par AGEOD. C'est pourquoi nous vous proposons aujourd'hui l'interview que nous avons réalisée avec Stéphane Parrin, designer d'Alea Jacta Est, chargé notamment de l'aspect historico-événementiel du jeu.


1/ Pouvez-vous présenter Alea Jacta Est - Roman Civil Wars en quelques mots ?

Il s'agit de la simulation opérationnelle des grandes campagnes des guerres civiles romaines sur PC. Nous adaptons le moteur commun à toute la gamme des jeux AGEOD à cette période fascinante qu'est l'Antiquité romaine. Les habitués ne seront donc pas dépaysés par le jeu, mais le système est suffisamment simple pour permettre aux nouveaux joueurs de découvrir avec plaisir ces conflits titanesques. Un tutoriel est d'ailleurs compris. Ce jeu est également le socle sur lequel nous allons développer d'autres campagnes antiques dans les mois à venir, allant en gros de -300 à 500 après Jésus-Christ.


2/ S'agit-il d'un jeu uniquement stratégique tournant autour de guerres et de conquêtes, ou bien la diplomatie, l'économie, la recherche en nouvelle technologie aura un rôle important à jouer ?

Pour les connaisseurs, le jeu ressemblera plus à Rise of Prussia qu'à Pride of Nations. En d'autres termes, les campagnes se focalisent plus sur l'aspect stratégique que technologique. Bien évidemment, l'aspect économique sera important car il s'agira pour les protagonistes de lever et entretenir armées et flottes, en fonction de leur trésor et des capacités des territoires qu'ils contrôlent. Dans AJE, seuls l'or et l'influence apparaîtront. Il n'est ici pas question de pétrole, munitions et conscrits. Par contre, la diplomatie est importante, car la plupart des nations voisines à Rome peuvent profiter ou intervenir dans le conflit, au profit d'un joueur ou non !


3/ Pourquoi avoir choisi cette période, alors que vos précédents jeux étaient plus tournés vers les XVIIIème et XIXème siècles ?

Cette période a toujours été attractive pour bon nombre de joueurs, et paradoxalement bien peu traitée par les maisons d'édition. Nous voulions combler ce vide, et avouons que la période permet des campagnes particulièrement passionnantes : qui n'a jamais rêvé de prendre la place de César ou du grand Pompée ? Le défi majeur fut de transformer le moteur basé avant tout sur les capacités de feu en capacités de choc, plus conformes aux guerres antiques.


4/ Pourquoi avoir choisi Alea Jacta Est comme titre de votre jeu ?

C'est un clin d'œil au moteur commun à tous les jeux de la gamme, nommé AGE. En même temps, la citation de César traversant le Rubicon en prononçant « Alea Jacta Est », traduit en français par « Les dés sont jetés »,  reflète parfaitement l'esprit ludique et stratégique voulu par cette simulation des guerres civiles romaines.


5/ Qu'est-ce qui différencie Alea Jacta Est de vos précédentes productions ?

De manière générale, le jeu est plus dynamique, plus intense, car les objectifs sont personnalisés autour des principaux prétendants au trône, ou du contrôle de Rome, pour plusieurs scénarios. Nous avons insisté sur des aspects clés plus opérationnels en retirant des côtés de micro-gestion que nous estimons moins intéressants du point de vue antique. Surtout, AJE est un jeu « de base », destiné à accueillir de nombreuses extensions sur les périodes antiques. C'est la première fois qu'AGEOD lance une collection de scénarios et de campagnes où, nous l'espérons, nous pourrons retrouver à terme ‘ensemble des conflits de la période. C'est un beau défi !


6/ Avez-vous eu recours à des sources de types bibliographiques pour réaliser Alea Jacta Est ? Si oui quelle sont ces sources et lesquelles vous nous conseillerez ?

Argggl ! Oui, bien sur ! Ce sont des monceaux de textes antiques qu'il a fallu trouver et décrypter pour assurer une légitimité historique maximale au jeu. Les plus intéressants sont finalement les sources d'époque, et je conseille vivement les Histoires de Tacite, qui se lisent aisément et qui expliquent tout le conflit entre Vespasien, Vitellius et Othon en 69 par exemple. Ensuite viennent Appien, Plutarque, Dion Cassius et César, pour les campagnes AJE essentiellement. Pour info, je dévore actuellement Tite Live et Polybe en vue de nouveaux scénarios…


7/ Est-ce qu'une encyclopédie ou des fiches descriptives seront présentes dans le jeu pour en savoir plus sur les différents éléments et protagonistes du jeu ?

Nous aimerions bien car certains conflits sont peu connus du grand public, mais nous avons tellement peu de temps. Nous allons tout faire pour. Et un appel aux volontaires est envisagé.


8/ Est-ce que nos différentes parties généreront (aléatoirement ou non) des événements historiques (découverte, culture, réforme, catastrophe naturelle…) ?

Bien évidemment, et ceci par trois manières possibles : d'abord par des événements déclenchés par tests de pourcentages et autres conditions, en fonction ou non des actions des joueurs, ensuite par des événements à choix multiples, et enfin, par des options de jeu personnalisées à chaque camp, que le joueur décidera d'appliquer ou non. Tous les aspects seront pris en compte (politique, météo, économie, social, diplomatie…).


9/ Dans Alea Jacta Est, incarnons-nous un personnage historique ou bien une dynastie ?

La plupart des campagnes sont longues, mais dépassent rarement la vie d'un homme. AJE permet de simuler plutôt un Etat-major ou une faction (ainsi, Pompée, Scipion, Caton… mais également les fils de Pompée). Autre exemple avec Vespasien qui, s'il meurt, passe la main à son fils Titus. Les joueurs incarnent des factions opposées les unes aux autres, composés de multiples chefs (des centaines ont été crées juste pour AJE, d'autres sont en court de création pour les extensions). A l'exception de quelques chefs génériques (pour les tribus entre autres), tous sont historiques.


10/ Allez-vous proposer au joueur de prendre le contrôle d'une des grandes familles romaines (Julii, Scipii, etc) ou de la "cité-état" sénatoriale de Rome (S.P.Q.R) ou ce sera Rome dans son ensemble ?

Ici, ce sont plus des factions (Optimates, Populares…) que des familles. Les scénarios reflètent avant tout des guerres civiles, il s'agit donc prioritairement d'éliminer les chefs de partis adverses ! Une exception cependant, car deux campagnes permettent de jouer le royaume du Pont, seul camp actif non-romain, avec Mithridate VI. La Cité-état sénatoriale de Rome jouable contre des nations étrangères est programmée pour la prochaine extension, Birth of Rome (BOR).


11/ Assassinat, trahison, empoisonnement seront-t-ils de la partie ?

De part l'époque jouée, ils apparaîtront, mais parcimonieusement, avec tous les risques inhérents à leur utilisation. Rien n'est pire pour un joueur jouant César ou Septime Sévère de voir celui-ci brutalement assassiné en court de partie sans rien pouvoir faire sinon subir ! Cependant, pour les parties à trois joueurs (Septime Sévère, Pescennius Niger et Clodius Albinus par exemple), attention aux retournements de veste !


12/ Nous avons vu que le jeu s'intéressera à  "L'année des quatre empereurs (68 à 70)". Est-ce que l'on aura le droit aux usurpations et aux rebellions dans l'armée ?

Cette campagne courte mais intense est l'une des plus rebondissantes de toutes, car de multiples intervenants extérieurs (et intérieurs) interviennent constamment. Les événements, les trahisons et rebellions n'arrêtent pas. Une vraie série télé ! Joueurs, gardez vous sur vos arrières et protégez vos prétendants, c'est un conseil !


13/ Est-ce que la religion sera traitée ? Si oui, aurons-nous le droit de choisir notre religion (païen, chrétien...) ? Ce choix offrira-t-il des bonus ou des malus ? Pourrons-nous changer la religion comme Aurélien qui est retourné à un culte ancien (Sol Invictus) ?

La religion n'est pas encore traitée actuellement dans AJE, car elle n'intervient pas réellement dans l'environnement politico-militaire entre -87 et 197. Elle sera certainement développée lors de campagnes mettant en avant les luttes religieuses sous le Bas-Empire romain.


14/ Le joueur sera-t-il limité par le Sénat ou sera-t-il libre de faire ce qu'il souhaite ?

Les campagnes AJE basiques démarrent avec la guerre entre Marius et Sylla, autrement dit, les joueurs peuvent se passer des remarques du Sénat, qui dans cette période devient consultatif et moins directif. AJE reflète l'ère des ambitieux et des personnalités. Cependant, nous travaillons sur une extension sur la Haute-République, où le Sénat sera réellement puissant (parfois même au détriment des actions des joueurs).


15/ Les barbares seront-ils tous hostiles au joueur ? Est-ce que nous aurons la possibilité de les recruter ?

Si la plupart des barbares seront hostiles aux différents joueurs, certaines actions permettront de recruter effectivement des supplétifs barbares, comme mercenaires.


16/ L'esclavage sera-t-il traité dans Alea Jacta Est ?

Il est traité, même si lors des guerres civiles (sujet d'AJE), il n'est pas mis en avant, car les camps romains opposés débauchaient les prisonniers de guerre romains adverses pour renflouer leurs armées. Contre des non-Romains, l'esclavage est une option utilisable.

En outre, le scénario bonus de pré-commande du jeu porte sur la révolte de Spartacus, et le camps des esclaves et gladiateurs y est jouable !


17/ Avez-vous prévu des scénarios de type « what if » ?

Actuellement non, car nous avons déjà énormément de travail avec les innombrables conflits romains.
Mais rien n'est à exclure dans l'avenir (César face aux Parthes, Alexandre le Grand contre Carthage…)


18/ Avez-vous prévu une grande campagne, de sorte que le joueur puisse jouer de la « création de Rome » par Remus et Romulus jusqu'à la scission entre l'Empire Romain d'Occident et l'Empire Romain d'Orient (ou Empire Byzantin) suite aux invasions barbares ?

La guerre civile entre Marius et Sylla compte déjà 72 tours à elle seule. Imaginons la première guerre punique avec 276 tours ! Alors, fantasmons de -390 (attaque de Brennus sur Rome)à la chute de l'empire en 476, cela nous donne 10392 tours… des centaines d'heures de jeu pour un joueur très rapide, c'est dire…

En théorie, cela resterait faisable (mais uniquement du côté romain et en solo), car les Romains ont toujours eu un conflit quelque part et peu d'années sans guerre. Mais il faudrait du temps pour raccrocher entre elles les différentes campagnes qu'il faudra d'abord créer… On peut rêver.